Ville de banlieue, chambre anonyme, petit travail, salaire correct, peu d'intérêt, pas d'amis, de vagues relations. Aucune envie, plus de désir, quelques habitudes. C'est tout un monde de désespoir et de non-sens qui s'ouvre en même temps que commence ce roman des perdants et des abandonnés, ceux qui ont érigé la routine en mode de vie, le renoncement en principe, le défaitisme en valeur. On pourrait en rester là : mais l'auteur va tellement loin dans sa peinture clinique, crue, désenchantée, qu'on relève la tête et le défi. Plus que son antihéros, en tout cas : c'est du moins ce qu'il faut se souhaiter...
Écrit avant Les Particules élémentaires, le roman sulfureux qui fit la notoriété de Michel Houellebecq, Extension du domaine de la lutte est de la même veine : plume acérée, aride, assassine. On en sort laminé, mais bien déterminé à continuer la lutte, et c'est là que tout le paradoxe de la littérature prend un sens. Un roman saisissant à lire avec précautions. --Karla Manuele Quatrième de couverture
Mon père est mort il y a un an. Je ne crois pas à cette théorie selon laquelle on devient réellement adulte à la mort de ses parents ; on ne devient jamais réellement adulte. Devant le cercueil du vieillard, des pensées déplaisantes me sont venues. Il avait profité de la vie, le vieux salaud ; il s'était démerdé comme un chef. T'as eu des gosses, mon con... me dis-je avec entrain ; t'as fourré ta grosse bite dans la chatte à ma mère. Enfin j'étais un peu tendu, c'est certain ; ce n'est pas tous les jours qu'on a des morts dans sa famille. J'avais refusé de voir le cadavre. J'ai quarante ans, j'ai déjà eu l'occasion de voir des cadavres ; maintenant, je préfère éviter. C'est ce qui m'a toujours retenu d'acheter un animal domestique. Je ne me suis pas marié, non plus. J'en ai eu l'occasion, plusieurs fois ; mais à chaque fois j'ai décliné. Pourtant, j'aime bien les femmes. C'est un peu un regret, dans ma vie, le célibat. C'est surtout gênant pour les vacances, Les gens se méfient des hommes seuls en vacances, à partir d'un certain âge : ils supposent chez eux beaucoup d'égoïsme et sans doute un peu de vice ; je ne peux pas leur donner tort.
Description:
Ville de banlieue, chambre anonyme, petit travail, salaire correct, peu d'intérêt, pas d'amis, de vagues relations. Aucune envie, plus de désir, quelques habitudes. C'est tout un monde de désespoir et de non-sens qui s'ouvre en même temps que commence ce roman des perdants et des abandonnés, ceux qui ont érigé la routine en mode de vie, le renoncement en principe, le défaitisme en valeur. On pourrait en rester là : mais l'auteur va tellement loin dans sa peinture clinique, crue, désenchantée, qu'on relève la tête et le défi. Plus que son antihéros, en tout cas : c'est du moins ce qu'il faut se souhaiter...
Écrit avant Les Particules élémentaires, le roman sulfureux qui fit la notoriété de Michel Houellebecq, Extension du domaine de la lutte est de la même veine : plume acérée, aride, assassine. On en sort laminé, mais bien déterminé à continuer la lutte, et c'est là que tout le paradoxe de la littérature prend un sens. Un roman saisissant à lire avec précautions. --Karla Manuele
Quatrième de couverture
Mon père est mort il y a un an. Je ne crois pas à cette théorie selon laquelle on devient réellement adulte à la mort de ses parents ; on ne devient jamais réellement adulte. Devant le cercueil du vieillard, des pensées déplaisantes me sont venues. Il avait profité de la vie, le vieux salaud ; il s'était démerdé comme un chef. T'as eu des gosses, mon con... me dis-je avec entrain ; t'as fourré ta grosse bite dans la chatte à ma mère. Enfin j'étais un peu tendu, c'est certain ; ce n'est pas tous les jours qu'on a des morts dans sa famille. J'avais refusé de voir le cadavre. J'ai quarante ans, j'ai déjà eu l'occasion de voir des cadavres ; maintenant, je préfère éviter. C'est ce qui m'a toujours retenu d'acheter un animal domestique. Je ne me suis pas marié, non plus. J'en ai eu l'occasion, plusieurs fois ; mais à chaque fois j'ai décliné. Pourtant, j'aime bien les femmes. C'est un peu un regret, dans ma vie, le célibat. C'est surtout gênant pour les vacances, Les gens se méfient des hommes seuls en vacances, à partir d'un certain âge : ils supposent chez eux beaucoup d'égoïsme et sans doute un peu de vice ; je ne peux pas leur donner tort.